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Abus pédosexuels : données inédites sur le rôle et l’impact d’internet

Résultats d’une Enquête internationale auprès des survivantes et survivants


Pour diffusion immédiate

Ottawa, le 26 septembre 2017. – Le Centre canadien de protection de l’enfance (CCPE) présente aujourd’hui, à l’occasion du 15e anniversaire du Cyberaide.ca, les résultats de son Enquête internationale auprès des survivantes et survivants ainsi que des recommandations pour lutter contre ce crime horrible.

Cette enquête avait pour objectif de mieux comprendre les difficultés particulières vécues par les survivantes et survivants d’abus pédosexuels qui ont été enregistrés et, dans bien des cas, diffusés sur Internet. À ce jour, 150 survivantes et survivants de nombreux pays ont fourni de précieux détails sur leurs expériences. Voici les faits saillants des résultats :

  • Les 150 participants (100 %) rapportent que les abus pédosexuels qu’ils ont subis ont été enregistrés (images, vidéos); 61 % pensent que ces enregistrements ont aussi été diffusés sur Internet et 38 % n’en sont pas certains.
  • 70 % des survivantes et survivants craignent de se faire reconnaître par quelqu’un qui aurait vu les images des abus pédosexuels qu’ils ont subis.
  • 30 répondants déclarent avoir été identifiés par quelqu’un qui avait vu les images des abus pédosexuels qu’ils ont subis.
  • 58 % des répondants déclarent avoir été abusés par plusieurs personnes.
  • 82 % des abuseurs primaires impliqués dans les cas d’abus par plusieurs personnes étaient des parents de l’enfant ou des membres de sa famille élargie.
  • 56 % des survivantes et survivants ont indiqué que les abus ont commencé avant l’âge de 4 ans et 87 % étaient âgés de 11 ans ou moins.
  • 42 % ont été abusés pendant plus de 10 ans.
  • Au moins 74 répondants (presque 50 %) ont été victimes d’abus sexuels organisés (abus sexuels commis sur des enfants par plusieurs abuseurs).
  • 67 % des survivantes et survivants ont reçu des menaces de violence physique; certains ont été menacés de mort.
  • 85 % des survivantes et survivants pensent avoir besoin d’aller en thérapie ou de se faire suivre.

« Les résultats de cette enquête jettent un éclairage précieux sur les nouvelles réalités auxquelles sont confrontées les victimes d’abus pédosexuels, observe Lianna McDonald, directrice générale du Centre canadien de protection de l’enfance. De nos jours, il est plus que probable que les abus pédosexuels soient aussi enregistrés. Cette couche de plus qui s’ajoute au traumatisme de l’enfant a un impact inimaginable et peut affecter toutes les facettes de son existence. »

Les forces policières et les centrales de signalement du monde entier qui luttent contre l’exploitation sexuelle sur Internet voient tous les jours des preuves qui corroborent les témoignages exprimés par les survivantes et survivants qui ont participé à l’enquête. Aux États-Unis, le programme CyberTipline du National Center for Missing and Exploited Children (NCMEC) reçoit chaque mois une moyenne d’un million de signalements de cas d’exploitation sexuelle d’enfants.

« Ce fut un honneur d’appuyer le CCPE dans cette enquête inédite, déclare Michelle DeLaune, vice-présidente directrice et directrice générale du NCMEC. L’angoisse particulière dont souffrent les personnes mises en scène dans des images d’abus pédosexuels n’avait pas encore été bien étudiée, de sorte que les services thérapeutiques qui leur sont offerts sont carrément inadaptés. Maintenant que les survivantes et survivants font entendre leurs voix, nous pouvons apprendre de leurs expériences et adapter nos interventions. »

Plus tôt cette année, le CCPE a dévoilé Projet Arachnid – un système automatisé qui détecte les photos et les vidéos d’abus pédosexuels sur Internet et envoie aussitôt aux hébergeurs des notifications leur demandant de les retirer immédiatement.

« Quand les pires moments de votre vie d’enfant ont été enregistrés ou subsistent d’une quelconque façon, vous avez l’impression que votre abuseur, même derrière les barreaux, aura toujours une emprise sur vous, confie l’une des survivantes qui a participé à l’enquête. Je réprime tant de ces souvenirs pour survivre, et la seule possibilité que quelqu’un puisse revivre ces moments et y trouver du plaisir m’empêche de tourner la page, de trouver l’apaisement. »

Un groupe international d’experts a contribué par son savoir et ses suggestions à la conception de l’enquête et participé à l’élaboration des recommandations générales. Les résultats de l’enquête appellent de toute urgence la communauté internationale à prendre des mesures immédiates et à mettre en œuvre les recommandations suivantes :

  1. Réduire la disponibilité des photos et des vidéos d’abus pédosexuels dans l’espace public d’Internet, autant les nouvelles images que les images existantes. Il y aurait lieu d’envisager l’adoption de Projet Arachnid comme plateforme mondiale pour détecter rapidement les images et aviser les hébergeurs, qui se verront aussitôt dans l’obligation de les retirer immédiatement.
  2. Améliorer la sensibilisation et la formation des professionnels en matière d’abus pédosexuels pour qu’ils soient en mesure de déceler les situations d’abus et d’y réagir adéquatement. Les personnes susceptibles de découvrir des situations d’abus doivent mieux comprendre les dynamiques des diverses situations d’abus, le processus complexe du dévoilement et le rôle des technologies dans la commission des abus pédosexuels.
  3. Renforcer la coordination et la communication entre tous les systèmes et entités qui interviennent auprès des enfants victimes d’abus sexuels et d’exploitation en ligne. On pense ici entre autres aux services de protection de l’enfance, aux écoles, aux centrales de signalement, aux thérapeutes, aux forces policières, au secteur privé, aux organismes de services à l’enfance et aux centres d’appui aux enfants.
  4. Élaborer des solutions globales pour reconnaître adéquatement les droits et les besoins particuliers des victimes d’abus avec prise d’images. L’accès à des thérapeutes disponibles et compétents et à des moyens d’obtenir une indemnisation financière fait partie des solutions. Les survivantes et survivants doivent aussi avoir la possibilité de faire entendre leur voix dans le système de justice pénale (p. ex. déclarations des victimes).

« Les témoignages de ces victimes montrent qu’il faut s’intéresser d’encore plus près à leurs expériences pour répondre à leurs besoins particuliers », observe Corinne Dettmeijer-Vermeulen, rapporteuse nationale des Pays-Bas sur la traite des êtres humains et membre du groupe de travail international de l’enquête.

Le Centre canadien gère Cyberaide.ca, la centrale canadienne de signalement des cas d’exploitation sexuelle d’enfants sur Internet. Le rapport intégral de l’Enquête auprès des survivantes et survivants, avec ses recommandations, est disponible ici.